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21 juillet 2013 7 21 /07 /juillet /2013 16:15

21 juin 2013
N'djamena Times

 

Depuis plus de 15 ans, tous les observatoires et ONG spécialisés dans l’évaluation des pratiques de corruption à travers le monde sont unanimes : le Tchad n’a jamais quitté le peloton de tête des pays les plus corrompus d’Afrique, et même du monde.

Cela donne la chair de poule mais ce n’est que la triste et affligeante réalité, car aucun secteur d’activité danshttp://www.jeuneafrique.com/photos/006102009115051000000corruption2.jpg ce pays n’échappe à ce fléau. Le plus grave étant que c’est l’Etat qui se trouve être l’opulente matrice de cette sordide pratique ayant tout simplement – et le plus gaillardement du monde - érigé la corruption en … sport national !

Officiellement, la frontière séparant le Tchad du Cameroun entre Nguéli et Kousseri se ferme chaque fin de journée à 17 h pour être de nouveau ouverte le lendemain matin à 8 h.

 
Dans les faits il n’en est rien, car dès que la nuit commence à tomber, le trafic au dessus des fleuves Logone et Chari est même plus actif que de jour. Et pour cause : Si les véhicules ne franchissent plus la frontière, il en est autrement des piétons et des engins à deux roues – sur lesquels se juchent généralement 3 à 4 personnes – qui vont et viennent dans les deux sens toute la nuit à un rythme démentiel.


En fait, traverser la frontière Tchado – Camerounaise de nuit a un prix : 500 FCFA pour chaque piéton, et 1000 FCFA pour une moto, à quoi il faut ajouter 1000FCFA pour chaque passager de l’engin. Il suffit de compter le nombre de personnes à pied ou à moto se déplaçant de part et d’autre des deux pays pour aboutir à la logique conclusion que les agents de police ou ceux préposés aux douanes en service nocturne au poste frontière de Nguéli s’en retournent à leurs domiciles respectifs au lever du jour les poches pleines à craquer de billets de banque.


C’est ainsi que, assurer la garde de nuit à ce poste frontière est devenu non seulement une aubaine, mais surtout un privilège pour la simple raison que les agents choisis pour ce service sont tenus chacun à leur patron une quote-part bien déterminée du butin récolté toute la nuit.


Mais il ne faut pas croire que la chaine s’arrête seulement aux agents chargés de la surveillance de la frontière ou à leurs seuls supérieurs directs, ces derniers gavent chaque semaine leurs propres directeurs de grosses enveloppes afin d’être maintenus le plus longtemps possible dans leurs postes si juteux.


Les bakchichs à la frontière de Nguéli ne sont qu’une des innombrables d’expressions de ce cancer qui a métastasé dans toutes les couches de la société tchadienne. Dans toute l’administration aucun service ne s’obtient sans qu’il n’y ait eu un « dépannage » opéré sous la table.


Dans les commissariats de police, les brigades de gendarmerie, au palais de justice, au Trésor public, à l’hôpital – de la maternité à la morgue – il faut toujours mettre la main à la poche si l’on tient à être vite et bien servi. Dans les services des Douanes, ou dans n’importe quelle régie financière, vos documents et factures auront beau être en règle, tant que vous n’aurez pas « graissé la main » de l’agent dont la fonction est de vous servir, vous serez contraint d’attendre des semaines, des mois, voire un an et plus. N’allez surtout pas vous plaindre auprès de son chef, il vous dira le plus sérieusement du monde qu’il vous suffit de « motiver » son agent qui – pour sa part – lui sera reconnaissant de vous avoir fait le dessin !


Il faut le dire, au risque d’en pleurer, la pratique de la corruption s’est tant et si bien généralisée au Tchad que dans les lycées, collèges, et jusqu’aux instituts de l’enseignement supérieur, il suffit de « banquer » la somme qu’il faut pour que les bonnes notes soient assurées, et même … que les diplômes soient obtenus.


Et parlant de diplômes, il est courant que, contre espèces sonnantes et trébuchantes des élèves de terminale ou de l’université – munis de fausses cartes d’identité - composent aux examens à la place des vrais impétrants. Assurant ainsi à ces derniers leurs diplômes sans en avoir le vrai niveau. Ainsi en est-il au Tchad où même les diplômes sont achetés ou négociés. Mais alors pour quel résultat ?


Personne n’ignore rien de ces ignobles réalités, Idriss Deby encore moins, mais tout le monde s’en accommode. Le pays tout entier navigue ainsi dans un immense océan d’une corruption est devenue La règle de vie.


Comment cette corruption n’est-elle pas compréhensible quand l’on rencontre au sommet de la haute administration de nombreux individus propulsés du jour au lendemain aux plus hautes fonctions, directeur, des Douanes, des Impôts ou du Trésor sans être titulaire seulement du BEPC, et ne justifiant tout juste pour unique compétence que le fait d’être un neveu, un beau frère ou un beau fils du chef de l’Etat ou de l’une de sa demi douzaine d’épouses !


On comprend tout autant aisément quez de jeunes blanc becs à peine âgés de 25 ou 30 ans, roulant dans de somptueuses voitures, ne justifiant d’aucun cursus scolaire, baragouinant quelques mots de français et ne parlant qu’arabe local, qui raflent à la pelle de faramineux marchés publics, pour, au bout du compte, être propriétaires d’insolents duplex et immeubles au quartier chic Amdjaress, Farcha et Diguel à N’Djamena.


Dans la Police, l’Armée, la Gendarmerie ou la Garde Nomade, il existe des milliers de personnes vivant tranquillement au quartier, sont détenteurs d’une carte professionnelle, mais sont payés à la fin de chaque mois sans jamais être démasqués. Ces individus sont recrutés par des réseaux qui leur offrent 50% du salaire ainsi payé dans la plus parfaite illégalité.


Pour décrire toutes les astuces et autres subterfuges déployés tous les jours et à tous les instants au Tchad, il faudrait tout un livre. En tout cas il sera écrit un de ces jours, Inch’ALLAH !


C’est ainsi que, s’engager à combattre le cancer de la corruption au Tchad nécessitera une impitoyable guerre de répression de longue haleine, car tout le monde au Tchad connait, pratique ou ferme les yeux sur la corruption.


Cette guerre contre la corruption sera dure, longue, fatigante, mais elle devra absolument être conduite jusqu’au bout. Il y va du salut et de la crédibilité de notre pays réduit aujourd’hui en véritable far West.


Cette guerre, ne sera pas une affaire de six mois, d’un ou de deux ans. Il sera question d’identifier tous les modes de corruption entrés dans les habitudes depuis plus de deux décennies, de les circonscrire et de les bannir.


Il faudra aussi, et surtout, « laver » les mentalités et les cerveaux, et procéder à une nouvelle éducation civique qu’il faudra systématiser de la maternelle à l’Université.


A dire vrai, pour venir à bout de la corruption généralisée qui englue le Tchad, il faudra peut-être envisager 20 à 30 ans de lutte. En somme toute une génération. Cela ne pourra ne pas être fait.


C’est l’une des options les plus urgentes du projet de notre société.

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