10 mars 2009
Juliette Abandokwe
La réflexion sur le mandat d'arrêt décrété contre le président soudanais El Bechir, constitue comme souvent un grand dilemme.
Dans l’absolu, El Bechir est responsable d’un génocide au sein du peuple qu’il « gouverne ». Donc, clairement il doit être sanctionné pour cela.^
Ensuite, évidemment les conditions d’applicabilité sont difficiles à plusieurs égards.
Pour commencer, qui va appliquer, et comment. Avec quelles conséquences géopolitiques.
La qualité et les motivations de ceux qui subviennent aux besoins alimentaires des juges doivent aussi être pris en compte ; comme souvent, ce sont ceux qui allument les feux, qui crient aux
pompiers à qui mieux mieux. Dans le cas d’El Béchir, un lien est à faire avec la rébellion tchadienne, qu’il soutient contre un autre sanguinaire monsieur, Idriss Deby, soutenu à son tour très
activement par la France.
Donc éliminer El Béchir servirait accessoirement à soulager les intérêts français au Tchad. Rappelons-nous également
que ce même Idriss Deby que la France protège si ardûment fut le complice no 1 d’Hissène Habré, qui lui est pour le moment protégé par le gouvernement sénégalais, et qu’il continue à sévir contre
les intérêts vitaux du peuple qui l’a « librement et démocratiquement » élu.
On n’a donc plus besoin de se demander pourquoi la classe politique internationale cherche à éliminer les uns plutôt que les autres, alors que tous ont commis des atrocités de part et d’autre.
Pourquoi éliminer El Béchir et favoriser la continuation du règne de Deby, qui à son tour est le parrain de Bozizé le maître de Bangui, gardien des intérêts miniers occidentaux en République
centrafricaine…. La raison est évidente. Les dictateurs africains éliminent les gêneurs, et les puissances occidentales font exactement la même chose.
Que l'Union africaine soit contre la décision de la CPI est très normal, puisqu'elle regroupe en grande partie les prochains "clients" de la CPI. Si l'un d'entre eux peut être mis en danger de
cette façon, ceux qui se sentent visés, pourraient bien se voir menacé à leur tour dans un avenir plus ou moins proche.
Dans une perspective purement géopolitique, on peut donc très sérieusement douter de la transparence de la mission du CPI. Et pire que tout, nous assistons une fois encore comment les grands de
ce monde utilisent le sang versé pour alimenter les intérêts politico-économiques supra-nationaux.