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2 février 2011 3 02 /02 /février /2011 02:26

2 février 2011

Juliette Abandokwe 

 

Bangui, 2h du matin. L’heure de la proclamation officielle des résultats du scrutin du 23 janvier dernier approche. Les jeunes banguissois sont en ébullition dans les quartiers depuis plusieurs jours, et la colère gronde. Et pour cause. Ils en ont plus qu’assez de la misère dans laquelle ils sont maintenus par un pouvoir prédateur et égocentrique à outrance. Ils en ont assez du chômage massif, du manque chronique d’eau potable et d’électricité dans un pays où il pleut dix mois sur douze, du manque de perspectives d’avenir qu’ils sont en droit de s’attendre de la part d’un pouvoir qu’ils auraient parait-il élu librement et démocratiquement en 2005.

 

A Bangui, on passe plus de trois semaines sur quatre dans les places mortuaires, et les gens n’ont souvent même pas l’argent du taxi pour emmener leurs morts à la morgue. La qualité de vie à Bangui est le plus souvent indécente, et sous-entend une misère décuplée dans les provinces. Les jeunes dans les quartiers savent pertinemment que Bozizé, le fossoyeur du peuple centrafricain, ils ne l’ont pas élu cette fois-ci. Ils savent que peu l’ont élu, et d’ailleurs tout le monde connait parfaitement les fraudes massives qu’ils ont eux-mêmes vu de leurs propres yeux et vécus.

 

Les chiffres, en possession de ce qui reste d’une CEI menacée par la garde prétorienne de François Bozizé, filtrent pourtant, et la rumeur chiffrée se propage déjà au crépuscule de ce 2 février 2011. La victoire semble bel et bien indiquer le tandem complice patasso-bozizesque, doté de plus de 85% des voix, avec une avance surnaturelle du candidat sortant Bozizé, qui a pourtant brillé pendant 6 ans par son incompétence, ses violences en tout genre, ses exactions militaires tout azimut, et qui n’a absolument rien apporté à son peuple, sinon désolation et désordre extrême.

 

La complicité électorale des deux larrons se développe depuis bien avant le retour de Patassé à Bangui en 2009, et passe notamment par l'assassinat de Goungaye Wanfiyo en décembre 2008, qui se préparait à attribuer publiquement les responsabilités de graves crimes contre l’humanité du couple patasso-bozizesque.

 

Ainsi, si Bozizé se fait chasser aujourd’hui, son ami Patassé reprendrait les choses là où il les avait laissées en 2003, et ferait certainement revenir son acolyte au bord de la mangeoire, quand les temps se seraient calmés et que les comédies d’amnisties seraient jouées. 

 

Le positionnement d’opposant de Patassé n’a été que de la propagande pré-électorale. Tout le monde le sait parfaitement.

Opposant de qui d'abord? Belle question, puisque Patassé et Bozizé ont été tour à tour amis, associés, maître et élève pseudo-Général, et enfin ennemis, de façon très stratégique depuis plusieurs années.  

 

L’ancienne victime de Bozizé est revenue, et doux comme un agneau, Patassé se pose en victime de l’éviction de la tête d’un parti qui, dit-il, lui appartient. Depuis quand un parti appartient-il à une personne ? Voilà déjà l’évidence de ce que le vrai Patassé pense du peuple et du territoire qu’il se sent en droit de diriger.

D’ancien bourreau, il était devenu victime de la vilénie du rebelle Bozizé venu de N’Djamena, son ancien chef d’état-major, est tombé officiellement en disgrâce, on louait néanmoins ses compétences d’ingénieur agronome au service de sa terre d’exil au Togo. Le hold-up électoral de ce 23 janvier dernier se préparait déjà.

Pourtant Ange-Félix Patassé est bien celui qui  a mandaté Jean-Pierre Bemba le Congolais,  partageant avec lui la responsabilité des massacres perpétrés par les banyamulengue en Centrafrique, dans sa quête de protection contre le méchant Bozizé venant du nord, karchérisant lui aussi tout sur son passage. Par karchérisation on entend les viols, les massacres et les pillages des populations centrafricaines sur sa route vers le butin présidentiel de Bangui en 2002-2003.

En 2009, Patassé déclarait qu’il n’était pas au courant du procès de Bemba à la CPI et, interrogé sur le fait de savoir s’il aurait été possible d’arrêter cette violence contre les civils entre 2002 et 2003, il a seulement répondu, “Nous ne sommes pas en 2002-2003, nous sommes en 2009.” !

Edifiant de cynisme !

Mis à part les intérêts ethniques pouvant motiver une préférence pour Patassé, nous savons aujourd’hui qu’il est exactement du même acabit que Bozizé.  La prédation et l’assassinat politique ont été, et seront toujours, son principal moyen d’action pour se maintenir au pouvoir. Patassé prend bel et bien le peuple Centrafricain pour un peuple d’imbéciles et d’amnésiques.

En conclusion, un scrutin en faveur du tandem Bozizé/Patassé n’est de toute évidence qu’une grotesque manigance de plus pour maintenir au pouvoir une équipe dirigeante qui à l’heure qu’il est a déjà largement prouvé au peuple Centrafricain son niveau de duplicité, d’incompétence criminelle et de flagrante non-intention de se concentrer sur le développement humain du peuple centrafricain.

Aujourd’hui, le peuple martyr Centrafricain mérite bel et bien autre chose qu’une réédition de ses souffrances passées, une rediffusion de l’intolérable, de l’inadmissible et du non-validable. 

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