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14 novembre 2011 1 14 /11 /novembre /2011 20:44

14 novembre 2011
Médard Polisse-Bébé

 

Au moment où les centrafricains s’apprêtent à fêter dans l’allégresse, le 1er Décembre 2011, la proclamation de notre république, je me sens le devoir, comme tout autre centrafricain animé de l’esprit patriotique, d’attirer l’attention de l’opinion et des pouvoirs publics centrafricains sur l’état de délabrement avancé dans lequel se trouve aujourd’hui notre pays.  

 

La république centrafricaine se meurt et, avec elle, l’espoir de tout un peuple de voir sa chère patrie se mettre résolument sur la voie de développement. Un tour d’horizon des différents domaines de la vie du pays laisse présager des lendemains difficiles pour la population centrafricaine en proie à une paupérisation sans précédent depuis la légitimation en 2005 d’un pouvoir issu du fameux « sursaut patriotique » du 15 Mars 2003, et qui peine à s’imposer comme un pouvoir véritablement démocratique.

 

 

Sur le plan politique, un déficit démocratique notoire résultant du hold up électoral du 23/01/2011 a permis  de rompre le dialogue avec l’opposition politique exclue de l’Assemblée nationale par la volonté d’un homme imbue d’autorité et dont la soif inextinguible pour le pouvoir pousse, en sus, à verrouiller tous les moyens d’expression démocratique : interdiction d’organiser les meeting et les manifestations publiques. L’intimidation et la terreur, infligées à la population par certains éléments de la garde présidentielle, participent à l’entretien du climat d’insécurité chronique qui règne dans le pays, et qui prive nos concitoyens de la liberté d’aller et venir sur l’ensemble du territoire national. Les violations répétées des droits humains caractérisées par les arrestations et détentions arbitraires, les expéditions punitives, les crimes économiques, les malversations financières et autres détournements de deniers publics par les tenants du pouvoirs sont autant de dérives dictatoriales qui n’ont pas lieu d’être dans un pays déjà suffisamment échaudé par plusieurs années de turbulences politiques qui ont, par le passé, mis à très rude épreuve l’unité nationale, la paix civile, mais entraîné malheureusement aussi au sacrifice de sang de ceux de nos compatriotes victimes d’exactions aveugles. 

 

Sur le plan économique, un manque de structures adaptées dû à l’irresponsabilité d’un régime vorace dont la principale préoccupation est de s’approprier les biens de la nation centrafricaine, a mis l’économie du pays dans un état de déliquescence jamais connu depuis l’accession à l’indépendance. Pour beaucoup de nos concitoyens, le décollage économique reste une chimère dont ils mesurent les tristes retombées tous les jours aussi bien dans leurs porte-monnaies que dans leurs marmites, sauf quand on s’appelle Ngouandika et compagnie (tous milliardaires et fiers de l’être …). L’absence d’infrastructures adéquates tels que les ponts, chaussées, routes, et autres chantiers, ne permet guère la facilité des échanges économiques à l’intérieur comme à l’extérieur. Le clanisme, le clientélisme, la gabegie, érigés en système de gouvernement, amenuisent toutes les chances d’une perspective de croissance susceptible de contribuer au développement de la république centrafricaine. En plus, aucune politique économique digne de ce nom n’est envisagée par l’actuel gouvernement pour favoriser un essor industriel dans un pays qui regorge d’énormes matières premières ainsi que d’autres richesses inestimables diverses et variées dont beaucoup restent inexploitées. 

 

Sur le plan social, le taux de chômage a atteint un record inégalé du fait, non seulement d’une économie moribonde liée à une baisse d’activités due à l’absence d’une véritable politique d’emplois (même précaires), mais aussi de la discrimination à caractère tribal et/ou politique entraînant ainsi les frustrations qui sont généralement une source de fragilité pour l’unité et la concorde nationales. Nombre de postes  dans l’administration publique sont occupés majoritairement par la famille nucléaire du Général Président, les militants de son parti le KNK (au pouvoir) et apparentés. Aussi, faute de soins adaptés, les hôpitaux publics sont-ils devenus plus que des mouroirs où les malades s’y entassent comme du bétail à l’abattoir en attente d’être zigouillé. Le taux de prévalence VIH et d’autres maladies vénériennes prend une tournure vertigineuse ; au point que la mortalité infantile et maternelle, considérablement réduite dans les années quatre-vingt, atteint désormais des sommets hyper inquiétants qui laissent craindre, au-delà des drames humains familiaux, un déséquilibre démographique préjudiciable pour l’avenir de notre pays.

 

Il en est de même des écoles publiques qui ne sont plus que des lieux de villégiature où l’avenir des enfants (et donc du pays) est mis entre parenthèse en totale contradiction avec les exigences du développement humain prôné par les organisations internationales telles que l’Unesco, la francophonie, etc. Quant à la jeunesse centrafricaine, elle est comme d’habitude sacrifiée sur l’autel des promesses fallacieuses et démagogiques qui l’enferment dans une léthargie visant à la rendre amnésique et insensible aux sirènes révolutionnaires susceptibles de conduire à un chambardement, à l’exemple du « printemps arabe ».   

 

Bref, la décrépitude de la situation d’une population désormais confrontée aux problèmes de tout genre (difficulté d’accès à l’eau potable, à la santé, à l’éducation des enfants, défaut de fourniture d’électricité, exposition à l’insécurité, etc.), n’est pas de bon augure et exige du pouvoir autiste de Général Bozizé une seule alternative : Agir pour arrêter la déchéance de la nation centrafricaine.

 

Afin d’abréger en effet la souffrance de cette nation centrafricaine astreinte aux errements d’un régime aux abois, un « Sursaut Démocratique » est plus que jamais nécessaire ; le Président Bozizé doit se résoudre à prendre des mesures qui s’imposent impérativement avant la fin de l’année en cours:

  • Dissoudre immédiatement l’Assemblée nationale monopartite actuelle qui est sans commune mesure avec l’aspiration profonde du peuple centrafricain;

  • Dissoudre sans délai le gouvernement « anachronique » et incompétent dit  « Touadéra 3 » dirigé par un Premier Ministre complètement paumé et visiblement dépassé par les évènements du moment;

  • Ouvrir un dialogue franc et direct avec toutes les forces vives de la nation pour la formation d’un gouvernement d’union nationale sur la base d’un programme minimum commun ; ce gouvernement, dit de transition, devrait être chargé de préparer de nouvelles élections libres, crédibles et transparentes ;

  • Appeler toute la nation centrafricaine dans son ensemble à l’unité pour faire face aux difficultés de l’heure et relever le défi du développement.

 

Ces mesures d’urgence demandent, de la part du Général Président, un certain courage pour s’affranchir, dans son entourage, des velléités obscurantistes d’une bande d’indécrottables qui n’entendent nullement partager le pouvoir dans l’intérêt du peuple centrafricain. La responsabilité politique recommande, dès lors que l’avenir du pays est gravement menacé, de mettre l’intérêt supérieur de la nation au-dessus des intérêts partisans d’une caste ou d’un groupe catégoriel.

 

En effet, le peuple centrafricain aspire, comme tous les autres peuples libres, à un certain « Bien » : la liberté (celle de se soigner, de s’instruire, de se vêtir, de se nourrir et de se loger). Aujourd’hui cette liberté fondamentale inscrite au patrimoine idéologique national  centrafricain, par notre père fondateur Barthélemy Boganda, se trouve sérieusement entamée par l’égocentrisme de ceux qui pensent que « gouverner, c’est se servir ou se faire servir » par le peuple souverain (au lieu de servir le peuple). Et ce n’est pas de l’anti-bozézisme primaire que de dire ouvertement qu’il y a un sérieux problème de gouvernance en Centrafrique et que les centrafricains souffrent parce que privés de toute ou partie de cette liberté fondamentale. Le centrafricain n’a-t-il pas le droit de voir sa condition de vie et d’existence s’améliorer ? Comment un Etat souverain peut-il faillir aussi lamentablement dans sa mission de fournir à son peuple de l’électricité, de l’eau courante, de faciliter l’accès aux soins pour tous, de promouvoir l’éducation des enfants, de garantir la sécurité sur toute l’étendue du territoire, de défendre l’intégrité territoriale, de construire des infrastructures de développement, etc. ? Questions légitimes auxquelles toute personne de bon sens, au vu de la situation actuelle de Centrafrique, peut répondre de façon tout fait anodine sans être soupçonnée d’avoir des arrières pensées politiciennes.

 

Aujourd’hui, la vérité est que « Mon Pays va Mal », notre pays va très mal. Et le Président Bozizé doit, non seulement le reconnaître, mais agir en conséquence. La république centrafricaine est le patrimoine commun de tous les centrafricains sans distinction; elle est notre Bien à tous. Elle n’est pas la propriété d’une famille, d’un clan, d’une tribu. Rien ne peut justifier, a fortiori dans le contexte de graves crises actuelles que traverse notre pays, l’exclusion de la majeure partie de nos concitoyens par le régime en place en raison de leur appartenance politique, tribale et/ou régionale. Que les détenteurs du pouvoir actuel ne se fassent pas d’illusion : ce sera avec le concours de tous les centrafricains que notre pays se remettra debout.

 

Cela dit, j’exhorte vivement le Président Bozizé à tirer les leçons du passé en référence à l’histoire de notre pays où, à force d’entêtement, un mouvement populaire et/ou sursaut patriotique, a pu emporter les régimes qui se sont montrés autoritaires, despotiques et surtout antidémocratiques. Il est donc du devoir et de la responsabilité du Président de la république qu’il est d’écouter les jérémiades de la majorité silencieuse dont les difficultés pour s’en sortir vont crescendo et pourraient menacer la paix civile si elles n’étaient pas rapidement prises en compte. Les mécontentements de plus en plus exacerbés exprimés à travers les manifestations spontanées, comme récemment dans certains quartiers de Bangui, Bouar, Bambari, prouvent à suffisance qu’une tension socio-politique couve. Il est temps que le Président Bozizé se résolve à sortir de ses certitudes (sinon de sa cécité) pour enfin affronter la réalité en répondant aux préoccupations de nos concitoyens.

 

A défaut, il ferait mieux de tirer les conséquences politiques de son inaction…   

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