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5 mai 2010 3 05 /05 /mai /2010 23:34

5 mai 2010

Par Daouda GBAYA

Le Quotidien (Sénégal)

 

Réconciliation après un conflit violent en Afrique : la justice traditionnelle comme panacée

 

L’Institut Gorée a abrité, pour International Idea, les 28 et 29 avril derniers un séminaire régional sur le thème: Justice traditionnelle et réconciliation, après un conflit violent. La richesse des expériences africaines. A la lumière d’une étude réalisée au Rwanda, au Mozambique, en Ouganda, au Sierra Leone et au Burundi, les participants sont pour la plupart, convaincus de la pertinence du système traditionnel dans la réconciliation des populations en période post-conflit. 

L’Afrique a ses réalités et parmi celles-ci, la justice traditionnelle à laquelle font souvent recours les populations durant les périodes post-conflit. Et, «la prise en charge de l’héritage des conflits violents» par cette justice traditionnelle a fait de ce système un outil important de «rétablissement effectif des relations rompues au sein de la communauté». C’est le cas au Rwanda, au Mozambique, en Ouganda, au Sierra Leone et au Burundi où une étude réalisée par l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale(Idea) montre que les mécanismes traditionnels peuvent, dans certains cas, compléter efficacement les systèmes judiciaires conventionnels et offrir un véritable potentiel de promotion de la justice de la réconciliation et de la culture démocratique. Le Pr Luc Huyse, co-auteur de l’ouvrage Justice traditionnelle et réconciliation après un conflit violent. La richesse des expériences africaines, explique que l’évolution dans ce secteur suit quatre trajets différents et divergents : d’abord la pertinence du choix pour l’une ou l’autre forme d’amnistie, ensuite la marche en avant constante d’un modèle normatif qui donne la priorité aux poursuite judiciaire, initiées, organisées et contrôlées par des institutions de l’Etat, à l’instar de la Cour pénale internationale (Cpi) dont «les procédures sont formelles, rationnelles, juridiques», indique le Pr Huyse. Dans ces juridictions, relève-t-il, «on accorde plus d’attention aux suspects qu’aux victimes» car, «le devoir de juger est un argument plus fort que les ivresses contingences du contexte local». A la différence du système traditionnel où «les autorités s’abstiennent de toute action punitive».

 

A titre illustratif, la conférence nationale au Bénin ou encore la Commission vérité et réconciliation en Afrique du Sud. Parallèlement, il y a, poursuit le Directeur de publication de cet ouvrage, «l’avance d’une stratégie qui s’efforce autant que possible d’éviter les tribunaux», qu’ils soient modernes ou traditionnels. Dans ces cas, indique le Pr Huyse, les centres de gravité se déplacent du palais de Justice vers les auditions, des juges vers les dirigeants de la société civile locale, d’une détermination des culpabilités individuelles à une recherche des origines sociales des atrocités, des représailles juridiques à une réconciliation rituelle, d’un élan punitif d’origine internationale à la reconnaissance de toutes les opportunités offertes par le contexte local. Enfin, le Pr Huyse constate de «bonnes raisons de corriger cette image de trois stratégies «pures», qui diffèrent en tout point de vue et s’excluent mutuellement». L’une des raisons est que de «nombreuses politiques de justice transitionnelle associent, à divers degrés, des ingrédients de ces trois modèles précités». 

 
Obstacles et points faibles
 


S’agissant du système traditionnel, Pr Huyse relève des «obstacles et des points faibles». A ce niveau, il identifie la portée limitée d’actions et des effets de l’ethnicité, la religion, le sexe, les politiques, le caractère régional dans beaucoup de conflits, mais aussi les conditions d’applicabilité difficile liées à l’échelle des méfaits, d’un biotope blessé, l’érosion du capital.

 

 Autant de facteurs qui confortent Adebayor Dokoshi, membre du Conseil d’administration d’Idea, dans sa position qui voudrait que les Africains rompent avec certains stéréotypes. «Nous n’avons pas transcendé le fossé entre le modernisme et le traditionnel», dit M. Dokoshi. Il en appelle à une «révolution mentale» et, dans une approche holistique, soutient que la tradition se construit au quotidien.

 

Mais la préoccupation du général Lamine Keïta, participant au séminaire, c’est la vulgarisation de ces travaux dont il salue la qualité. L’ex ambassadeur du Sénégal à Washington estime que ces «documents ne doivent pas rester en vase clos entre intellectuels». Il propose de les traduire et de les vulgariser en langues nationales.Une préoccupation qui recoupe celle de Mark Salter, le chargé de programme à l’Idea. Mieux, il préconise des études sur ce mécanisme traditionnel en Casamance, au Sénégal en général, afin que les populations se l’approprient.

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