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25 octobre 2012 4 25 /10 /octobre /2012 10:24

25 octobre 2012
Source: KamerKongossa

 

Une d’un journal camerounais: qui s’en fout?

Hier, quelqu’un m’a demandé mon avis sur cette affaire de liberté d’expression au Cameroun. Moi j’ai rigolé hein? Parce que je ne comprends pas: liberté d’expression là ça sert à quoi même?

Les médias chez nous font partie d’un système commercial. Ce sont des épiceries de l’information dont les produits frelatés virent vite à la désinformation. Essayez de relire les prétendus scoops des journaux des jours ou des semaines après leur parution : pathétique.

Cela s’est vu avec la vraie fausse disparition de notre Reine, que n’a-t-on pas entendu ? Nulle part l’information, que du kongossa (le mauvais hein ?) des allusions, hallucination collective, florilège de « divers du bar ».

Il paraît que la naissance d’une étoile est un évènement rarement observé par l’œil humain. Moi je vous dis, la naissance d’une information au Cameroun est un évènement banal. Rentrez dans un bar, écoutez les conversations : je te dis qu’elle est enceinte. Mon cousin qui lave les plats à l’hôtel Sheraton de Paris l’a vue avec un musicien! Le lendemain vous les avez en une des journaux : Remue-ménage à Etoudi : La première dame enceinte s’enfuit à Paris pour produire un album avec un chanteur malien. Pas de vrai article, un malheureux entrefilet de conneries.

Il y’a des maux tolérés : le per diem. Cette enveloppe pleine de billets qu’on remet aux journalistes venus couvrir un séminaire, le lancement d’un produit, un meeting politique. Un achat de conscience à peine voilé. Quelle crédibilité donner aux propos d’un homme qui a reçu de l’argent pour écrire ? Pour penser ? Per diem : par jour. C’est ainsi que vivent nos médias au jour le jour, maintenus en vie artificiellement par des transfusions de franc CFA. Et ne croyez pas la rumeur qui dit que seule une certaine presse est concernée. Que non ! Même les « grands » s’y laissent prendre, c’est juste l’épaisseur de l’enveloppe qui change. Et on émarge ! Même lors des élections, nuitamment de préférence. Pourquoi être surpris qu’après on puisse être dégagé par un simple coup de tête…

J’ai vu mon pays s’engouffrer dans une pratique bizarre, le journalisme de liste. De la calomnie pure, sans preuve, sans traitement, sans vérification. Ça se vend, à un public qui se contente de la une. La liste des francs-maçons, la liste des homosexuels, la liste des futurs ministres, la liste des francs-maçons homosexuels futurs ministres…Quel intérêt pour un pays qui manque de tout ?

Un journal ayant publié une liste de camerounais en vue, prétendus homosexuels a vu son tirage épuisé en une journée il ya quelques années. Oui, j’ai vu des camerounais acheter des photocopies d’articles ! Du jamais vu. Tous les épiciers de médias ont flairé le filon, la pratique s’est institutionnalisée.

La radio quant à elle est prise en otage par une race qu’on appelle les « communicateurs ». Des animateurs et pseudo journalistes qui se perdent dans des émissions allant dans tous les sens. On commence par une critique d’art et puis on se retrouve en train d’expliquer aux auditeurs que si x musicien voit le sang partout, c’est parce que sa femme porte des sous vêtements rouges depuis des années. Cette tendance se vérifie dans l’ubuesque bataille pour le magot que constitue la gestion du droit d’auteur. Déclarations incendiaires, calomnie, injures, bagarres dans les studios. Le franc CFA dicte la ligne éditoriale et son règne est loin d’être terminé.

Et puis il y a ces émissions brulots où des camerounais croient refaire leur pays à coups d’appels téléphoniques. Le pays ci est gâté, les gens volent l’argent ! Des coups d’épée dans l’eau trouble de la mal gouvernance. Ou encore ces émissions surréalistes où des apprentis-sorciers, se transforment en juges. Boire sa castel tranquillement dans un bar et entendre : « ce matin nous recevons madame x qui accuse un certain Ngimbis Florian d’avoir perçu un million de CFA pour la faire admettre au concours de la police. Les résultats sont publiés Mlle x n’a toujours pas son sifflet. Au nom de la justice du peuple, ce voleur de Ngimbis va lui rembourser son argent ». Tout le monde regarde. Personne ne fait rien. Ni l’Etat, ni la corporation.

Mon opinion est connue : si on s’en tenait à la une des journaux camerounais, par an on aurait un Watergate, une douzaine d’affaires Elf et des démissions de hauts cadres en pagaille. Mais dans la réalité des faits, il n’en est rien, ou presque. L’immobilisme perdure et les lignes ne bougent que lorsque les dénonciations ciblent des pièces de la bataille de conservation de pouvoir qui fait rage dans le vaste échiquier de la mal gouvernance. Mon petit, pourquoi tu écris tes choses là sur moi ? Voici une enveloppe tais et toi et je te fournis un scoop sur le ministre x. Voilà ou l’on en est : l’enveloppe ou l’article.

Ce qui me chagrine dans toute l’histoire c’est que dans cette boue, sont noyés des hommes véritablement intègres. De vrais professionnels qui chaque jour font leur métier avec la naïveté et la candeur qui caractérisent la vocation. Mais voilà, seuls les médiocres tiennent le haut du pavé dans ce pays. Dans le monde de la radio par exemple remarquons que Douala semble prendre le pas sur Yaoundé avec une vision plus professionnelle et plus assainie d’un métier galvaudé sous les cieux d’Ongola.
Liberté d’expression ? Oui elle existe dans la République mais s’apparente à un libertinage savamment entretenu par l’Etat et la corporation d’hommes/commerçants de médias.

Quatrième pouvoir ? J’en doute. La forteresse la plus « imprenable » ne vaut rien si les gardiens ont été achetés. A quoi sert une liberté qui ne fait pas avancer les choses ?

On en est là : les chiens aboient, la caravane passe et les caravaniers lancent des morceaux de viande aux chiens qui aboient de plus belle. Sauf que, le camerounais qui vaque à ses occupations ignore si le chien aboie pour arrêter la caravane ou pour réclamer plus de viande.

Peace !

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