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28 septembre 2008 7 28 /09 /septembre /2008 11:36

24 septembre 2008 
Interview d’Antoine Glaser
La Lettre du Continent

L’Union Africaine rebaptisée l’Union des Dynasties Africaines

Avec la montée en puissance des fils ou de la famille des chefs Etats en Afrique, l'Union africaine pourra bientôt être rebaptisée « l'Union des dynasties africaines ».  La démocratie familiale règnera et la question des élections ne se posera plus…

Ainsi l’affirme « La Lettre du Continent ». François Bikindou a interrogé M. Antoine Glaser, le rédacteur en chef de cette confidentielle bimensuelle consacrée à l'Afrique.


François  BIKINDOU:
Vous êtes un homme averti des questions africaines. Vu de l'étranger, quelle image vous renvoie le Congo Brazzaville ?

Antoine  GLASER:
Le Congo Brazzaville, la difficulté en tant en tant qu’observateur extérieur c’est toujours l’espèce d’inadéquation entre un pays pétrolier avec des richesses extrêmement importantes et la difficulté des dirigeants à développer ce pays, ça veut dire à utiliser la manne du pétrole pour faire en sorte qu'il y ait un vrai décollage. C'est un pays qui a connu une guerre civile épouvantable en 1997 mais cela fait maintenant une dizaine d'années que le président Nguesso est revenu au pouvoir et c'est vrai que de l'extérieur on a toujours du mal à comprendre... On comprend les difficultés à relancer un pays mais au bout de 10 ans et avec des ressources pétrolières en très forte augmentation c'est vrai que cela reste une énigme


François  BIKINDOU:
Est ce que vous pourriez nous aider à déchiffrer cette énigme ?

Antoine  GLASER:
Je pense que c'est une question comme dans un certain nombre de pays africains, il y a une grande difficulté à répartir la manne de ces recettes pétrolières et à transformer en actifs socioéconomiques l'importance de ces recettes. C'est un système économique et financier qui fonctionne en fait offshore à tous points de vue parce que ce pétrole est vendu à l’extérieur du pays et rapporte énormément d'argent ; et on voit bien que même quand cet argent se retrouve dans les caisses du trésor public on a l'impression qu'il y a un manque de volonté. C'est vraiment une question politique et sociale de base.


François  BIKINDOU:
Votre " Lettre " a souvent présenté le régime congolais comme tournantautour de la famille de M. Sassou et de quelques hommes originaires de sa région. Est-ce que c'est comme cela que vous percevez le pouvoir de Brazzaville aujourd'hui ?

Antoine  GLASER:
C'est vrai que c’est la plupart des dirigeants africains - et là je ne voudrais pas stigmatiser uniquement le pouvoir congolais puisque je viens de terminer un éditorial sur les présidences de l'ensemble des pays africains - qui vivent vraiment un forme de dynastie. Ce n'est pas seulement le Congo mais l'ensemble des pays africains. C'est absolument incroyable ! Cela veut dire que ce qui était avant l'exception avec l'arrivée au pouvoir de Joseph Kabila en RDC et de Faure Gnassingbé à la mort de son père au Togo, on a l'impression que ça devient la règle (...)

C'est réel on voit bien  au Congo l'importance qu'a pris dans les cercles du pouvoir la famille élargie du chef de l'Etat


François  BIKINDOU:
Vous ne seriez pas surpris de voir un proche de Denis Sassou Nguesso lui succéder ?

Antoine  GLASER:
Oui absolument, à partir du moment... quand vous n'avez pas les moyens de faire de la politique, de mobiliser les gens, quand il y a un certain niveau... un seuil de pauvreté c'est bien évident quand même que c'est le clientélisme qui règne ! Cela veut dire les gens votent pour ceux qui peuvent les aider à mieux vivre et à mieux vivre dans le court terme. Donc c'est évident qu'il n’y a pas de programme, ce sont les dirigeants qui sont au pouvoir, qui ont le plus de possibilité à perpétuer finalement des dynasties et de se perpétuer au pouvoir.


François  BIKINDOU:
M. Sassou a donc toutes les chances de se faire réélire en 2009, de votre point de vue ?

Antoine  GLASER:
C'est évident qu'on a du mal à citer des pays africains avec des oppositions suffisamment fortes et unies pour pouvoir jouer le jeu démocratique, c'est-à-dire  avoir les moyens réels de contester le pouvoir en place pour gagner la voix des électeurs.


François  BIKINDOU:

Mais il ya quand même des noms qui pointent à l'horizon, comme Mathias Dzon par exemple ?

Antoine  GLASER:
Oui c'est vrai mais Mathias Dzon est lui-même issu du système puisque c'est l'ancien ministre des Finances !

L'impression générale -  encore une fois je en suis pas un spécialiste du Congo, je ne suis qu'un observateur -  est que s'il y a une opposition extrêmement forte des Congolais en particulier en exil, en France ou ils sont très actifs, on voit aussi à quel point les personnalités congolaises de l’opposition sont extrêmement divisées. On voit qu'il y a une bataille d'égo aussi importante au fil des ans ne serait que dans le parti de l'ancien président Lissouba, l'UPADS qui finalement est quasiment en voie d'implosion avec un certain nombre de personnalités qui revendiquent le leadership de ce parti. Et c'est à peu près la même chose ailleurs.

En ce moment on a l'impression qu'il y a une sorte de frémissement du côté d'un certain de personnalités de l'opposition pour se préparer et pour se montrer sur le long terme mais très franchement on ne voit pas vraiment des capacités de contester actuellement la puissance
financière du président Sassou.


François  BIKINDOU:
Est-ce que vous pouvez faire l'état des relations entre le Congo et le régime de Sarkozy ?

Antoine  GLASER:
Il faudrait un peu prendre le problème à l'envers. C'est-à-dire que le président Sarkozy n'a pas du tout la culture africaine qu'avaient ses prédécesseurs, en particulier Jacques Chirac et c'est vrai qu'il a d'abord vu l'Afrique comme un problème d'immigration. C'est vrai qu'il a un certain type de relations qui sont des relations personnalisées avec un certain nombre de chefs d'Etat africains mais absolument pas comme l'avait Jacques Chirac. Cela n'empêche pas qu'avec en particulier le président Bongo ou avec le président Sassou, on a l'impression, comme avec le président Wade qu'il y a des relations personnelles qui se sont tissées mais je pense que les choses sont en train de changer. On mystifie un peu cette françafrique et ses réseaux, l'Afrique se mondialise extrêmement vite et on voit que finalement les dirigeants africains sont de plus en plus à l'aise avec les dirigeants chinois qu'avec les dirigeants français surtout quand ici ils ont des problèmes de procès et de biens immobiliers et qu'ils désertent de plus en plus la France.

François  BIKINDOU:
Est-ce qu'on remarque les mêmes changements dans l'état des relations entre Total et le Congo ?

Antoine  GLASER:
Il faut distinguer la période de la guerre froide où ce n’était pas Total, c'était la société Elf Aquitaine (...) une société intégrée dans un processus public de l'Etat français qui est un processus sécuritaire et militaire où vous aviez des gens des services secrets intégrés dans les structures d'Elf. A ce moment-là c'était vraiment la chasse gardée. La France s'était fait virer de l'Algérie, elle avait perdu le gaz algérien et on recherchait de sources d'approvisionnement dans le Golfe de Guinée et on les a trouvées d'abord au Gabon, ensuite au Congo et en Angola. C'est vrai que c'est une période donnée très particulière. Maintenant Total n'a pas les relations politiques avec les chefs d'Etat qu'il avait auparavant. C'est un groupe qui a un certain nombre de fonds de pension américains parmi ses actionnaires, ce n'est plus une société d'Etat comme ça l'était donc ils ne peuvent pas n'importe quoi sur le plan politique, soutenir des chefs d'Etat ou faire des coups d'Etat et autres en Afrique. Donc les choses changent aussi. Il ne faut pas se leurrer. Cela n'empêche pas évidemment qu'à un moment donné, à travers du lobbying, à travers les fondations et autres ils peuvent aider bien sûr les dirigeants africains (...)


François  BIKINDOU:
Quels sont les grands titres de " La Lettre du continent ", le prochain numéro ?

Antoine  GLASER:
Le numéro de cette semaine justement, parce qu'il y a toujours beaucoup d'humour dans " La Lettre du continent ", c'est : " Tu seras président mon fils ". J'ai fait un papier en prenant un peu l'ensemble, pays par pays c'est vrai que c'est fascinant quand on voit, du nord quasiment au sud du continent à quel point ce sont les fils ou les parents des chefs d'Etat actuellement au pouvoir qui se préparent.

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