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23 mai 2008 5 23 /05 /mai /2008 00:09

22 mai 2008

Irinews

Depuis les années 1990, époque à laquelle le gouvernement camerounais a cessé d’alimenter gracieusement les centres urbains en eau, la majorité de la population de Douala, capitale commerciale du pays, a dû creuser ses propres puits, souvent contaminés.

Mais il y a quatre ans, une structure étincelante à la silhouette futuriste est apparue à Bessengué Akwa, un des quartiers les plus pauvres de la ville, et cet édifice n’est pas seulement une source d’eau fiable.

« Cette structure est vraiment belle », a déclaré à IRIN Rose Edouka, une habitante de Bessengué Akwa. « Depuis que cette oeuvre a été réalisée, il y a plus de vie au quartier ».

Il s’agit en effet d’un point d’eau unique, construit dans une enceinte de métal poli recouverte d’un auvent vert vif, qui rappelle les formes d’un papillon. Les habitants s’y rendent non seulement pour chercher de l’eau, mais aussi pour se réunir, selon Mme Edouka. « Notre communauté en est fière et nous veillons à ce qu’il soit bien entretenu ».

Avant le début des travaux de construction, Danièle Diwouta-Kotto, architecte camerounaise, avait rencontré la communauté pour demander aux habitants d’imaginer à quoi pourrait ressembler la borne-fontaine idéale, a expliqué Paulain Tchuenbou, membre de Doual'art, une association locale qui promeut l’art et le développement urbain et a aidé à animer les rencontres.

« Les populations de Bessengué Akwa voulaient d'un cadre qui leur servirait à la fois de lieu de rencontre, d'attraction et d'approvisionnement en eau », a-t-il indiqué.

L’architecte a présenté plusieurs propositions, et la communauté a choisi.

« On nous a consultés à chaque étape ; nous avons donc aujourd’hui le sentiment d’être les propriétaires de cette borne-fontaine et d’en être responsables », a déclaré à IRIN Maurice Eyango Madengue, chef de quartier de Bessengué Akwa.

Mode d’emploi

À l’intérieur de la structure se trouvent quelques bancs et un petit bazar dont la gérante s’occupe également de l’eau.

« Je me fais un peu d’argent en vendant de l’eau, et quelques sous, aussi, en vendant les marchandises de ma boutique », a indiqué Esther Mateo, la gérante, à IRIN. « Tout le monde en profite : ça me permet de gagner ma vie et ça permet à la communauté d’être constamment approvisionnée en eau ».

Esther Mateo vend son eau à un franc CFA le litre (moins du tiers d’un centime de dollar américain), soit la moitié du prix que coûtait l’eau à la communauté avant la construction de la borne-fontaine.

« Avant, la borne-fontaine publique la plus proche était à au moins un kilomètre et parfois, lorsque nous y allions, elle était fermée », s’est souvenue Mme Edouka.

Les revenus générés par la nouvelle borne-fontaine sont répartis comme suit : un tiers revient à la gérante, un autre à la compagnie d’eau et un troisième à un comité local, formé par la communauté pour veiller à l’entretien de la borne.

« J’espère qu’ils trouveront l’argent nécessaire pour éclairer la borne », a suggéré David Ndame, un habitant. « Ce serait un excellent endroit pour se réunir le soir ».

Des imitations pas si bon marché

La construction de la borne, financée par l’Union européenne et l’Institut régional de coopération-développement, un organisme français sis en Alsace, a coûté environ 2,6 millions de francs CFA (6 200 dollars).

Le projet a eu un tel succès que la Banque mondiale a décidé de financer la construction de deux autres bornes-fontaines semblables près de là, bien que celles-ci coûtent chacune 4,5 millions de francs CFA (10 750 dollars) et que, près de deux ans plus tard, pas une goutte d’eau n’en soit encore sortie.

Ces retards sont « préoccupants », a déclaré Chantal Reliquet, urbaniste à la Banque mondiale, dans un email envoyé à IRIN depuis Washington DC.

Mme Reliquet a toutefois ajouté que la Banque ne saurait en être tenue responsable, étant donné qu’elle « ne gère pas le projet, mais ne fait que financer les autorités [municipales] ».

À en croire Simon Ekotto, l’ingénieur chargé du projet pour le compte des autorités municipales, le problème repose sur un manque de communication, particulièrement entre la compagnie d’eau et la communauté. « Il y a eu beaucoup de malentendus », notamment en matière de facturation, a-t-il indiqué.

Mais pour Eyango Madengue, le chef de quartier de Bessengué Akwa, le problème repose sur le fait que le gouvernement n’a pas consulté la communauté. « Et je ne peux pas dire que nous ayons bon espoir de jamais voir ces bornes-fontaines devenir opérationnelles, à moins que la communauté puisse prendre les rênes [du projet] ».

Selon Marylin Douala Bell, présidente de l’association Doual'art, le projet de la Banque mondiale a été si mal conçu que cela revenait, pour la Banque, à jeter son argent par les fenêtres.

« Nous avons tenté de les prévenir, mais ils n’ont pas voulu nous écouter », a-t-elle dit. « Il est absolument indispensable, pour ce type de projets, de responsabiliser les populations en leur donnant la capacité de maîtriser toutes les étapes de la mise en oeuvre, de la conception jusqu'à la gestion ».

 

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