21 décembre 2009
Dominique Zotoglo
Dominique Zotoglo
Jusqu’à quand ? Jusqu’à quand l’Afrique cessera-t-elle d’être ballottée par les ambitions cyniques de l’occident et de la Chine ? Jusqu’à quand sera-t-elle le déversoir des nouveaux ou anciens pays riches tels que la Chine ?
Indépendant depuis bientôt cinquante ans, le continent noir n’en a pas fini avec les guerres et les conflits infernaux qui l’empêchent de se frayer une voie idoine pour son décollage économique. Oui, beaucoup d’efforts ont été consentis et beaucoup de progrès ont été réalisés sur les plans sociopolitiques et économiques ; mais il y a encore beaucoup de chemin devant nous pour prendre le train du développement. Néanmoins, ce ne sont pas les initiatives qui manquent sur le continent, partant des pères des indépendances, pionniers de l’unité du continent aux artisans des organisations sous régionales (CEMAC, CEDEAO, UEMOA…), pour qui la seule préoccupation est de sortir le continent de l’engrenage de la misère.
Malheureusement, la plupart de ces initiatives sont en léthargie avancée à cause de leur instrumentalisation politique par des dictateurs psychopathes manquant cruellement de vision pour le continent, et qui pensent effrontément qu’ils détiennent le titre foncier du continent à l’instar du héros de la lutte de libération du Zimbabwe, le tonitruant Robert Mugabe qui affirme, à qui veut l’entendre, que le Zimbabwe lui appartient. Quelle aberration ! Et ce sont ces genres de régimes que la Chine soutient sans états d’âme, tout en se défendant qu’elle ne peut s’ingérer dans la politique intérieure de nos pays. Tout porte à croire qu’une malédiction pèse sur notre continent devenu un jouet aux mains des puissances économiques du monde qui utilisent nos décideurs politico-économiques comme des marionnettes pour assouvir leurs ambitions néo-impérialistes. Mais de malédiction, que nenni ; sauf que celle qui pèse sur notre continent concerne bel et bien certains de ses fils que le destin a hissé à la magistrature suprême et qui, malheureusement, sont devenus des bergers mercenaires qui étranglent eux-mêmes leurs brebis.
Il est temps de nous réveiller ! Comment peut-on comprendre que notre continent, dont certaines régions sont qualifiées de scandales géologiques à cause de la richesse de leurs sous-sols (or, pétrole, diamant, uranium, cobalt, phosphate…) et du don merveilleux de la nature (café, cacao, coton, forêts tropicales…), continue de mendier auprès de l’occident et de courir derrière les cadeaux empoisonnés de la Chine ? Il est temps que nos dirigeants comprennent que la Chine, à l’instar des colons d’hier, n’a pas d’amis mais recherche ses intérêts ; et elle est en train de nous aveugler avec ses fameux dons (construction de ponts, de routes, et d’écoles…) qui ne servent qu’à endormir nos pays, sachant que la durée de vie des routes est rarement supérieure à 3 ans. Mais ce dont on ne parle jamais, ce sont ces contrats désavantageux pour les générations présentes et futures que la Chine, que la Chine signe avec nos pays pour l’exploitation de nos gisements.
Regardons de près le comportement des firmes chinoises dans la plupart des pays africains où elles procèdent à un pillage systématique et sans aucun contrôle des ressources ( le cas des champs pétrolifères de MUGLAD au Soudan, des mines de la République démocratique du Congo, des forêts du Gabon et du Congo…), au mépris des lois et conventions de nos pays, ce qui donne d’ailleurs libre cours à l’exploitation esclavagiste d’africains qu’ils emploient dans les mines et qu’ils traitent avec si peu d’égards. Les firmes chinoises sont devenues maîtresses dans l’art de la corruption puisque nos dirigeants acceptent d’être achetés sans état d’âme, et c’est la seule raison qui explique leurs agissements sans vergogne dans nos pays. Il est évident que notre salut ne viendra pas de la Chine, un vrai charognard au chevet de notre continent moribond !
Lors de sa tournée en 2004 en Afrique et en février 2009 (Mali, Sénégal, Tanzanie, Maurice), le président chinois Hu Jin Tao est accueilli en grandes pompes (chose normale !) comme un médecin qui détient la recette miracle pour soigner le mal qui ronge le continent. Mais ce qui intrigue dans la coopération sino-africaine, c’est ce fameux slogan « gagnant-gagnant » que chantent les diplomates chinois et leurs vassaux dans nos pays. Qu’y a-t-il de gagnant pour le peuple africain quand la Chine marche sur les cadavres de nos frères et sœurs du Darfour pour extraire ses 500 000 barils de pétrole par jour dans les champs pétroliers de MUGLAD au Soudan ? Qu’y a-t-il de gagnant pour le peuple africain quand la Chine continue de fournir des armes au régime génocidaire du Soudan et d’ailleurs ?
Qu’y a-t-il de gagnant pour le peuple africain martyrisé du Zimbabwe quand la Chine reste la seule puissance économique qui continue de soutenir le dictateur malade Robert Mugabe ? Je crois que ce ne sont pas des morts qui bénéficieront des dons (ponts, routes…) offerts par la Chine à nos pays ! Quel drôle d’accord gagnant-gagnant alors que la plupart des chantiers chinois en Afrique (télécommunications, BTP, gisements pétroliers…) sont envahis par la main-d’œuvre chinoise comme s’il n’existait pas de main-d’œuvre qualifiée dans nos pays ! Je ne vois pas un avenir dans des accords économiques qui ne favorisent pas la transformation de nos ressources et de nos produits agricoles par l’implantation des firmes véritablement africaines. Je veux parler ici de la création de la valeur ajoutée, donc de la richesse. Ceci passe inévitablement par l’industrialisation de notre continent avec une spécialisation de nos sous-régions en fonction des spécificités géologiques et agricoles. Ce qui manque à notre continent est bien la volonté politique de nos décideurs et non les capitaux comme certains l’auraient pensé !
Jetant un regard sur les plans NEPAD et OMEGA, je me demande s’il peut y avoir d’initiatives plus nobles pour le continent africain ! Malheureusement, les vautours qui gouvernent la plupart de nos pays n’ont pas fini de brader nos sous-sols aux réseaux mafieux occidentaux et chinois dont l’offensive économique et commerciale se double d’un lobbying diplomatique dans l’intérêt bien compris de la Chine, rien que de la Chine et de ses acolytes africains. Le seul bénéfice que l’Afrique tire de cette offensive chinoise, s’il en existe vraiment un, c’est bien ces infrastructures de qualité douteuse qui nous sont souvent léguées. Un autre trait de ces accords déséquilibrés entre la Chine et nos pays, c’est l’impact négatif qu’ils produisent sur nos économies en induisant des balances commerciales déficitaires, accentuant ainsi la précarité des économies africaines qui ont pour dénominateur commun la misère chronique des populations.
Il est impérieux pour nos autorités politiques de protéger nos PMI/ PME qui, dans des conditions extrêmement difficiles et dans le contexte de mondialisation de l’économie, essayent vaille que vaille, de créer des emplois et de la richesse dans nos pays, contre les appétits démesurés et malins de la Chine qui se fait passer pour le bon samaritain ! A nos dirigeants d’être vigilants et de croire en la capacité de nos élites à impulser le développement industriel et économique du continent, seul gage d’une paix sociale durable dans nos pays. Il nous faut alors retrousser les manches, en faisant surtout appel aux élites de la diaspora et celles restées sur le continent pour construire un lendemain meilleur. Oui, nous pouvons faire de ce rêve une réalité ! Il nous suffit de nous mettre au travail et de cesser de discourir dans nos éternels sommets folkloriques !
